L’aliénation parentale

Entre deux mondes : Mon parcours à travers la DPJ et l’aliénation parentale

La protection de l’enfance est censée être un filet de sécurité, un système conçu pour nous protéger quand nous sommes les plus vulnérables. Pourtant, comme beaucoup d’enfants pris dans ses mailles, mon expérience avec la DPJ a laissé des cicatrices qui persistent bien au-delà de l’enfance. Aujourd’hui, je souhaite partager mon histoire personnelle d’aliénation parentale et comment le système qui devait me protéger a, par moments, contribué à briser un lien précieux avec mon père.

L’aliénation silencieuse

Ce que je n’ai compris que bien plus tard, c’est que j’étais victime d’aliénation parentale – ce processus insidieux où un enfant est progressivement conditionné à rejeter un parent sans justification légitime. Les messages subtils, mais constants que je recevais à la maison dépeignaient mon père comme dangereux, indifférent ou incapable. « Ton père ne s’intéresse pas vraiment à toi », « S’il t’aimait vraiment, il ferait plus d’efforts », « Il est comme ça, il ne changera jamais »… Ces phrases, répétées comme des mantras, s’infiltraient dans mon esprit d’enfant.

La DPJ, bien qu’animée de bonnes intentions, n’a pas su identifier cette dynamique toxique. Pire encore, dans certains cas, leurs interventions ont renforcé cette aliénation en validant des accusations non vérifiées, ma mère était celle sous enquête, mais mon père n’a jamais été informé, car elle l’avait étiqueté comme un homme violent. Ironique, vu que c’était elle qui faisait de la violence verbale et physique.

Le vide qui grandit

Les années ont passé, et le fossé s’est creusé. Les appels téléphoniques sont devenus plus rares, les visites plus espacées. J’ai commencé à intérioriser l’idée que cette absence était normale, voire préférable. Mon père est devenu un personnage périphérique dans ma propre histoire, un homme que je connaissais à peine, mais que j’avais appris à blâmer pour bien des malheurs.

Les fêtes, les anniversaires, les moments importants de ma vie – il n’était pas là. Sa présence, ou plutôt son absence, se faisait sentir comme une ombre, un rappel constant de ce que je croyais être son désintérêt. Ce que je ne savais pas, c’est à quel point ma mère avait saboté des plans et que la justice avait à tort accusé celui qui avait un tempérament passif me laissant avec mon parent instable et qui travaillait comme escorte.

La prise de conscience

C’est au début de l’adolescence que j’ai commencé à questionner cette réalité imposée. Des incohérences dans les récits qu’on m’avait servis sont apparues. Des souvenirs enfouis de moments de complicité avec mon père ont refait surface. Des questions ont commencé à germer : Et si on m’avait menti? Et si mon père avait toujours voulu être présent mais en avait été empêché?

Ce fut le début d’un long et douloureux processus de redécouverte. J’ai dû déconstruire des années de conditionnement, remettre en question des certitudes profondément ancrées. J’ai dû faire face à une vérité troublante : j’avais été privé d’une relation qui aurait pu être précieuse, et la DPJ, censée agir dans mon « meilleur intérêt », avait parfois été complice de cette privation. Et ma grand-mère maternelle avait joué un rôle au centre de tout ça. Les mensonges s’accumulaient. 

La reconstruction

Reconstruire une relation brisée par l’aliénation parentale est un défi immense. Les années perdues ne se rattrapent jamais complètement. En plein début de période hormonale, mon père et moi tentions de bâtir quelque chose de nouveau sur les ruines de ce qui aurait pu être. Ce n’était pas facile – la méfiance, les malentendus et les habitudes bien ancrées se dressaient souvent entre nous.

Depuis, il y a aussi eu des moments de grâce, des instants où je reconnais dans ses yeux une émotion authentique, où je retrouve dans son rire un écho de mon enfance, où je sens que malgré tout ce qui nous a séparés, un lien indéfectible subsiste.

Ce que j’ai appris

Cette expérience m’a enseigné des leçons douloureuses mais essentielles :

Le système de protection de l’enfance, malgré ses nobles intentions, n’est pas infaillible. Il peut parfois causer des dommages en croyant faire le bien.

L’aliénation parentale est une forme de maltraitance psychologique dont les effets sont dévastateurs et durables, tant pour l’enfant que pour le parent aliéné.

La vérité a plusieurs facettes, et il est crucial de toujours questionner les récits unidimensionnels, surtout quand ils concernent des relations humaines complexes.

La résilience n’est pas seulement la capacité à surmonter les traumatismes, mais aussi le courage de remettre en question ses propres croyances et de reconstruire à partir de la vérité, aussi douloureuse soit-elle.

Un appel à la vigilance

En partageant mon histoire, je ne cherche pas à dénigrer la DPJ dans son ensemble – de nombreux intervenants font un travail remarquable dans des conditions difficiles. Je souhaite plutôt lancer un appel à la vigilance, à la nuance, à une approche plus holistique de la protection de l’enfance.

Aux professionnels de la protection de l’enfance, je dirais : méfiez-vous des récits trop parfaits, des accusations sans preuves, des dynamiques qui isolent un parent sans raison valable. L’aliénation parentale est réelle, et ses conséquences sont dévastatrices.

Aux parents en conflit, je dirais : n’utilisez jamais vos enfants comme des armes dans vos batailles personnelles. Le prix qu’ils paieront est incommensurable, et les blessures que vous infligez perdureront bien au-delà de votre colère. Leur besoin doit être au centre des interventions faites, l’égo n’a pas sa place.

Aux enfants qui, comme moi, ont grandi entre deux mondes, je dirais : votre histoire vous appartient. Vous avez le droit de la questionner, de la réécrire, de chercher votre propre vérité au-delà des récits qu’on vous a imposés. Et méfiez-vous des membres de la famille qui se défilent.

Aujourd’hui, je continue mon chemin de guérison. Chaque pas vers la vérité est aussi un pas vers moi-même, vers une compréhension plus profonde de qui je suis et d’où je viens. L’aliénation, la violence et les mensonges m’ont volé une partie de mon enfance, mais ne définiront pas mon avenir. J’outille activement ma clientèle pour les aider à éviter de commettre des erreurs qui pourraient leur coûter cher dans leur relation avec leurs enfants. Et à ce jour j’accompagne mon conjoint dans sa propre bataille à travers une séparation à conflit, dans laquelle la DPJ choisi encore une fois de rester silencieuse.